La Religion

Deux étymologies pour le mot « religion » : relegere signifiant « relire » et religare signifiant « relier ». Lucrèce dans son De Rerum natura l’étymologie religare déclare : « je viens défaire les nœuds dont la religion nous entrave »

 

  1. La religiosité est-elle une dimension essentielle de l’homme ?

1) La spiritualité : une dimension essentielle ?

Est-ce que, si l’homme perdait totalement tout sens du religieux, il s’appauvrirait ?

On a peut-être raison de voir trois parties dans l’homme :

  • le corps
  • l’intelligence
  • l’âme, elle-même divisée en deux composantes : sensibilité/ spiritualité

Ce qui nous amène à nous interroger sur les conséquences d’une perte possible de la spiritualité : si l’homme devenait complètement « sourd » à cette composante, perdrait-il quelque chose de lui-même ?

  1. Marcuse pose la question dans L’homme unidimensionnel : est-ce qu’une civilisation complètement matérialiste et technicienne est une civilisation où l’humain, dans l’homme, s’appauvrit ?

Est-ce que la déchristianisation n’entraine pas la médiocrité d’une époque « sans âme » ?

L’homme peut-il facilement se passer de l’affirmation d’un Absolu, d’une Transcendance ?

 

2) Universalité du sentiment religieux

Ne pas réfléchir au niveau de l’individu : beaucoup de personnes se passent de toute forme de spiritualité. Mais ce n’est plus vrai au niveau de l’espèce : toutes les sociétés humaines connues développent des formes de croyance religieuse.

Henri Bergson : « On trouve des sociétés qui n’ont ni science, ni art, ni philosophie. Mais il n’y a jamais eu de société sans religion ».

Toute la différence, c’est la proportion des athées et des croyants dans une société donnée. Mais la religion existe partout dans le monde.

D’ailleurs, si les religions établies perdent leur crédibilité, les sectes prennent le relai, comme si le besoin religieux de certains devait absolument trouver un débouché.

Quelles différences faites-vous entre sectes et religions ?

RELIGION SECTE
Pratique majoritaire Pratique minoritaire
légitimité Mal vue, dénigrée
officialité Secret, caractère occulte, initiation
  prosélytisme
  intéressement
Dieu : un être abstrait Dieu : un humain vivant, contemporain
  Absence de respect du croyant (pratiques contraignantes, aliénantes) : endoctrinement, conditionnement
   

 

On voit que toutes ces distinctions sont relatives : certaines religions s’apparentent beaucoup à des sectes / certaines sectes sont aussi respectables que des religions.

On serait même assez tentés de dire que les religions sont des « sectes qui ont réussi » (cf. les persécutions subies par les premiers chrétiens, quand ils n’étaient qu’une poignée d’ « allumés » dont le leader était Jésus Christ)

De plus, les sociétés qui sont les plus éloignées de la religion de leur origine (nos sociétés occidentales déchristianisées) sont encore tout imprégnées de rites qui sont le témoin d’un besoin de type religieux :

Texte de Mircea Eliade (historien des religions, d’origine roumaine) Le Sacré et le Profane ; 1957 (Hatier p 196 / photocopie) :

  • Proposez un titre
  • Mircea Eliade pense-t-il que la religion est essentielle à l’homme ? Pourquoi ?

 « La majorité des « sans-religion » se comportent encore religieusement, à leur insu. Il ne s’agit pas seulement de la masse des « superstitions » ou des « tabous » de l’homme moderne, qui ont tous une structure et une origine magico-religieuse. Mais l’homme moderne qui se sent et se prétend areligieux dispose encore de toute une mythologie camouflée et de nombreux ritualismes dégradés. Comme nous l’avons mentionné, les réjouissances qui accompagnent la Nouvelle Année ou l’installation dans une maison neuve présentent, laïcisée, la structure d’un rituel de renouvellement. On constate le même phénomène à l’occasion des fêtes et des réjouissances accompagnant le mariage ou la naissance d’un enfant, l’obtention d’un nouvel emploi, une promotion sociale, etc. […]

En somme la majorité des hommes « sans-religion » partagent encore des pseudo-religions et des mythologies dégradées. Ce qui n’a rien pour nous étonner, du moment que l’homme profane est le descendant de l’homo religiosus et ne peut pas annuler sa propre histoire, c’est-à-dire les comportements de ses ancêtres religieux, qui l’ont constitué tel qu’il est aujourd’hui. D’autant plus qu’une grande partie de son existence est nourrie par des pulsions qui lui arrivent du tréfonds de son être, de cette zone qu’on a appelée l’inconscient. […]

[…] dans la mesure où l’inconscient est le résultat des innombrables expériences existentielles, il ne peut pas ne pas ressembler aux divers univers religieux. Car la religion est la solution exemplaire de toute crise existentielle, non seulement parce qu’elle est indéfiniment répétable, mais aussi parce qu’elle est considérée d’origine transcendantale et, en conséquence, valorisée en tant que révélation reçue d’un autre monde, transhumain. La solution religieuse non seulement résout la crise, mais en même temps rend l’existence « ouverte » à des valeurs qui ne sont plus contingentes ni particulières, permettant ainsi à l’homme de dépasser les situations personnelles et, en fin de compte, d’accéder au monde de l’esprit.

[…] l’homme areligieux des sociétés modernes est encore nourri et aidé par l’activité de son inconscient, sans pour autant y accéder à une expérience et à une vision du monde proprement religieux. L’inconscient lui offre des solutions aux difficultés de sa propre existence, et dans ce sens il remplit le rôle de la religion, car, avant de rendre une existence créatrice de valeurs, la religion en assure l’intégrité. En un certain sens, on pourrait presque dire que, chez ceux des modernes qui se proclament areligieux, la religion et mythologie se sont « occultées » dans les ténèbres de leur inconscient – ce qui signifie aussi que les possibilités de réintégrer une expérience religieuse de la vie gisent, chez de tels êtres, très profondément en euxmêmes. »

 

Mircea Éliade, Le Sacré et le Profane, 1957, Gallimard, coll. « Folio essais », 1988, p. 173-180.

Un des intérêts de la religion : être pris dans un sens collectif : plutôt que de laisser à l’individu la tâche écrasante de donner du sens à sa vie, la religion met à la disposition de tous une sorte de « grille de lecture » collective (fut-elle négative cf. le péché) qui relie l’individu à l’humanité toute entière.

Bergson : « Certains, sans doute, sont totalement fermés à l’expérience mystique, incapables d’en rien éprouver, d’en rien imaginer. Mais on rencontre également des gens pour lesquels la musique n’est qu’un bruit »

On peut avoir cette « sensibilité », ce besoin d’absolu, sans jamais avoir entendu parler de religion (ce besoin va alors s’investir ailleurs) ; on peut également avoir baigné dans une enfance religieuse et y être complètement hermétique : l’éducation n’y fait rien.

Si l’on suit Bergson, on en vient à déplorer la tristesse d’un monde uniquement rationnel, un monde sans infini, sans choses qui nous dépassent, sans « incompréhensible », sans énigmes (ou : dont les seules énigmes sont les lacunes de la science)

« La religion fait partie de la culture, non comme dogme ni même comme croyance mais comme cri »

Merleau-Ponty

Quelle échappatoire ? La poésie…le théâtre : l’art… : le sacré, le sens

Tout le problème est de savoir si l’homme suffit à épuiser l’ordre du sens ou s’il est obligé de postuler un autre ordre, par rapport auquel sa vie puisse prendre sens.

3) Suffisance ou insuffisance de la Raison humaine, de l’ordre du Réel ?

Si la Raison humaine suffit, on peut rester dans l’ordre de l’Immanence : la valeur est dans l’être. L’homme doit se suffire à lui-même. Ses possibilités résident en lui seul : le sens de la vie est à produire, pas à attendre « d’en haut ».

Si la Raison humaine ne suffit pas, l’accomplissement de l’homme se fait nécessairement dans un ordre qui le dépasse : l’être (la vie vécue) est coupé à jamais de la Valeur. On voit déjà ceci à l’œuvre dans la théorie platonicienne des Idées, sans même que l’idée d’un dieu intervienne.

L’idée religieuse par excellence, c’est l’idée d’une distinction entre le profane et le sacré.

Le PROFANE = le quotidien, la réalité empirique et connue. Il est neutre quant à la valeur.

Le SACRÉ = le domaine où toutes les conduites humaines sont codifiées très rigoureusement. Il est chargé de valeur (saturé de valeur) mais cette valeur est bipolaire : le sacré est tantôt infiniment désirable, tantôt terriblement dangereux. Il est à la fois un domaine interdit (au risque d’être « profané ») et un domaine promis (l’objet d’une espérance).

Dans quelle mesure ne peut-on pas dire qu’une scène de danse, que les planches d’un théâtre, ne représentent pas, eux aussi, une expérience du sacré ? Nul n’est autorisé à s’y produire que les « officiants » (les artistes). Dans la salle, chacun est silencieux et recueilli (attend, pour tousser, qu’il y ait un « blanc » dans le spectacle).

Edward Bond : « Le théâtre partage ses limites avec la religion. La religion n’est que du théâtre qui veut être vrai »

Cette idée du sacré s’accompagne souvent d’une inversion : dans un lieu sacré, pendant une période sacrée, l’humain est régi par d’autres lois que profanes : ainsi, le sacrifice renverse l’interdit du meurtre. Les sacrifices rituels constituent toujours une transgression de l’interdit du meurtre (la loi commune est, momentanément, niée). Dans le christianisme, on peut se demander s’il y a une abolition des sacrifices ou leur consécration : le Christ s’est sacrifié pour son peuple. L’eucharistie peut être vue comme une sorte de cannibalisme symbolique : le chrétien mange, rituellement, régulièrement, le corps de son dieu (« Prenez et mangez, ceci est mon corps. Prenez et buvez, ceci est mon sang »)

Parlons un peu du cannibalisme. En progressant, l’ethnologie a découvert que le cannibalisme n’a jamais été ce qu’on avait d’abord pensé : un moyen commode de faire le plein en protéines animales. Le cannibalisme est presque toujours cannibalisme sacré (l’expression est de G. Bataille) : ainsi, en Nouvelle-Guinée, les femmes mangent les hommes, dans la Maison des hommes (à laquelle elles n’ont pas accès en temps normal). Elles mangent des parties précises, en fonction de leur lien de parenté avec le mort et de leur position sociale dans la tribu). Elles le font pour s’approprier (et donc transmettre) les qualités spirituelles et morales du mort. Il n’est donné qu’aux meilleurs d’être mangés.

4) Le religieux et le surnaturel

La religion repose sur l’idée du surnaturel …mais tout ce qui est surnaturel ne relève pas du religieux.

De même, il y a une partie, dans la religion, qui échappe au surnaturel : son inscription dans l’institution (la hiérarchie ecclésiastique, le pouvoir politique des dignitaires religieux).

Un exemple de surnaturel : la magie

Chez les peuples qui pratiquent la magie, elle est une action hallucinée où nous mimons une action réelle que nous ne pouvons pas accomplir, en invoquant une puissance de la nature qui confèrera une efficacité réelle à notre action symbolique (pratique vaudoue de la « transe du faiseur de pluie »). L’homme prétend agir (à distance) sur les éléments.

Dans la magie, l’homme refuse donc son impuissance.

Dans la religion au contraire, dans la prière, l’homme s’humilie comme impuissant. Et se contente de demander, humblement. Ce sont deux attitudes complètement différentes.

 

Quels sont les phénomènes surnaturels auxquels vous pouvez penser ?

Tables tournantes, voyance, prémonition, hypnose, ovnis

La religion, c’est quelque chose de bien précis. Il faut :

  • un dogme (une doctrine)
  • une morale
  • un culte
  • une assemblée de croyants
  • une relation personnelle avec un Etre Surnaturel Unique (ou : avec des êtres surnaturels)

 

 

II. Interprétations (critiques) de la religion (T ES : Nietzsche, Sartre, Freud)

  1. Feuerbach(XIXème, matérialisme athée)

L’homme a créé Dieu : il a érigé en objet son essence propre. La religion est une scission de l’homme avec lui-même. Il a posé Dieu en face de lui, comme un Être opposé à lui.

Pour se libérer du sentiment de ses limites, l’homme imagine un être parfait, qui possède précisément ce qui lui manque.

C’est comme si l’homme faisait deux parties de sa propre essence : l’une, négative, qu’il reconnaît comme lui-même. L’autre, positive, qu’il appelle Dieu et dans laquelle il s’aliène :

Ce que l’homme est : fini, imparfait, temporel, impuissant = humain

Ce que l’homme n’est pas : infini, parfait, éternel, tout-puissant = divin

Mais en vérité, c’est sa propre essence que l’homme adore.

Pour Feuerbach, la vraie séparation est : ce qui appartient à l’individu / ce qui appartient à l’espèce. A Dieu, on a prêté les caractéristiques de l’espèce : la somme des perfections des individus.

La force, et le paradoxe, du Christianisme est le suivant : Dieu a un double caractère : il a toutes les perfections du genre + il est conçu comme un individu (une sorte de Sur-personne).

Feuerbach propose de substituer à cette religion de Dieu une « religion de l’Homme ». Elle serait basée sur l’amour de l’homme pour l’homme. L’idée est de faire cesser cette hypocrisie par laquelle l’homme s’adore dans Dieu : autant qu’il s’adore de manière plus directe.

 

2. Nietzsche

Généalogie de la morale (vx Russ p 411): La religion est ce mensonge qui transforme la faiblesse en mérite, l’impuissance en bonté, la crainte en humilité, la lâcheté en patience, en vertu.

Les croyants sont des « faux monnayeurs » (roman de Gide en 1925)

Cette « officine où l’on fabrique l’idéal » sent le mensonge à plein nez.

Texte 15 p 388(Russ) : la mort de Dieu/ Hatier : 15 p 197 : Ecce homo

Ici, Nietzsche part d’un constat : Dieu est mort !

Cependant, cet événement est ambigu : il libère les philosophes et les « esprits libres » : « l’horizon nous semble de nouveau libre »

En même temps, l’humanité porte la culpabilité de sa mort (« c’est nous qui l’avons tué ») : l’acte est insensé, énorme, peut-être prématuré : l’homme est orphelin.

Il nous reste à devenir nous-mêmes des dieux pour être à la hauteur de cette action.

En même temps, c’est bel et bien une délivrance : l’idée de Dieu = la plus grande objection contre l’existence. Les « autres mondes » créés par les deux grandes religions universelles (le Bouddhisme et le Christianisme, Nietzsche ne parle jamais de l’Islam) sont synonymes de non-être, du non-vivre, de la volonté de ne pas vivre. En effet, ces religions condamnent le désir, le plaisir, la puissance. En elles, les instincts de décadence prennent le pas sur les instincts d’épanouissement : la Volonté de Néant triomphe de la Volonté de Puissance.

Or, Nietzsche est l’apôtre de la Volonté de puissance, non pas comprise comme la volonté d’être toujours le plus fort, mais celle de faire de toutes nos forces ce que nous faisons .

Ce qu’on appelle l’immoralisme de Nietzsche, c’est sa critique de la morale classique comme une « morale des moutons ». Avec l’aide de la religion, nous encensons la faiblesse afin de culpabiliser les forts. Nous le faisons, dans la mesure où nous ne sommes pas capables de la force (l’humilité chrétienne comme vertu cardinale).

De plus, le « tour de force » du Christianisme, c’est l’idée de la dette infinie : le Christ se proposait de « racheter les péchés » des hommes. Il voulait prendre sur lui la dette que nous avons envers notre créateur. Or, nous l’avons tué : la dette est devenue écrasante à jamais. L’homme est renvoyé à une éternelle culpabilité.

Nietzsche entend remplacer la morale religieuse, fondamentalement nihiliste, par la morale du Surhomme (l’homme n’est rien d’autre qu’une forme transitoire : un pont entre la bête et le surhumain).

N.B : Nihilisme = idéologie qui nie la notion de vérité absolue, de valeurs morales, et conteste la légitimité de la contrainte exercée sur les individus (anarchisme, amoralisme)

Du point de vue de la morale traditionnelle, Nietzsche est nihiliste / Nietzsche affirme que le vrai nihilisme est celui de la morale judéo chrétienne.

Dostoïevski, Les Frères Karamazov : « Si Dieu est mort, tout est permis » (Raskolnikov)

N’y a-t-il de morale que garantie par Dieu ?

 

3. Kierkergaard (fin XIXème, père de l’existentialisme, importance de la subjectivité)

Ce philosophe est très utile pour nuancer l’idée que la religion et la morale diffusent le même message : il y a un contenu moral dans toutes les religions. Mais aussi, dans toutes les religions, le point extrême (la sainteté/ le fanatisme ?) suppose une abolition de la morale.

Théorie des « trois stades » :

  • stade esthétique : en dessous de la loi (Dom Juan : l’homme des sensations) : c’est la vie dans l’instant : jouissance = immédiateté ; une quête infinie et insatisfaisante. C’est la singularité comme égoïsme.
  • Stade éthique : la loi morale (le mari : l’habitude) : c’est la soumission à la loi immuable, c’est l’ordre de la répétition. C’est l’universalité de la loi.
  • Stade religieux : au-dessus de la loi (le Saint : l’homme de Dieu) : transgression de la loi au nom de valeurs plus élevées. C’est la singularité d’un rapport unique à Dieu.

Au stade religieux, il y a une suspension de l’éthique au nom d’un idéal supérieur. C’est même cette suspension qui conditionne l’accès à une morale supérieure.

Pour les juifs et les chrétiens, c’est l’histoire d’Abraham confronté à l’ordre sacrificiel (immoler son fils Isaac). La découverte de la singularité de sa relation avec Dieu met Abraham au-dessus de l’éthique (l’éthique, domaine de l’universel, est niée au nom de l’exception)

1er stade : individualité infra-morale

2ème stade : universalisme de la morale

3ème stade : singularité supra-morale

 

<VOCABULAIRE>

Dogme = article de foi, auquel le croyant doit obligatoirement adhérer pour être accepté comme tel (croyance + autorité). L’ensemble des dogmes constitue la doctrine.

Révélation = phénomène surnaturel par lequel les vérités divines sont révélées aux hommes (trois religions révélées : Judaïsme/Christianisme/Islam)

Cléricalisme = sclérose de la religion vers sa composante institutionnelle (très peu pour le spirituel/ tout pour le temporel). L’Eglise : un appareil de pouvoir comme les autres.

Victor Hugo : profondément croyant ET profondément anti-clérical // grande sévérité de Kant par rapport aux atrocités commises par l’Eglise : ce qui se fait « au nom de la parole du Christ » n’est pas nécessairement fidèle à cette parole (il ne suffit pas de se réclamer de quelqu’un pour en être le digne représentant).

Laïcité = 1) Principe d’une stricte séparation du domaine religieux et du domaine politique (on veut que l’Etat n’exerce aucun pouvoir religieux/que les Eglises n’aient aucun rôle politique)

2) Respect d’une parfaite neutralité religieuse de l’espace public, qui serait, pour les citoyens, l’assurance que n’importe laquelle de leurs croyances sera respectée. Non pas obliger à l’absence de religion mais au contraire permettre une PLURALITE religieuse. L’idée n’est pas de favoriser une doctrine anti-religieuse (l’athéisme) sur l’une ou l’autre des doctrines religieuses : l’athéisme n’est pas « res publica ». Exemple de la Russie stalinienne : un athéisme d’Etat est aussi anti-laïc qu’une religion officielle.

 

Un peu d’histoire :

1598 : Edit de Nantes : Henri IV proclame le principe de la tolérance religieuse

1685 : Edit de Fontainebleau = révocation de l’Edit de Nantes. Louis XIV rompt avec la liberté de penser : « Un Roi, une Foi, une Loi ».

Pb : est-ce la neutralité DE l’espace public ou la neutralité de tous DANS l’espace public ?

La religion est une affaire privée, mais cela ne contraint pas le croyant à l’isolement (il y a des affaires privées d’ordre collectif) : collectif (un ensemble qui n’inclut pas la totalité des hommes) ≠ public

L’idéal laïc : ne pas mettre en avant ce qui divise les hommes mais ce qui les unit.

N.B : on peut être croyant ET laïc comme athée ET laïc. C’est savoir créer une distance à soi qui permet que s’ouvre un pan d’universalité où peut se trouver un accord avec ceux qui sont d’une opinion différente.

Coran, 2ième Sourate, 54ème verset : il n’existe pas de contrainte légitime en matière de religion.

Ce qui concerne l’Etat, ce sont les actes, pas les croyances.

Croyants (pratiquants/non-pratiquants + orthodoxes/ hétérodoxes (« bricoleurs ») ≠Non-croyants :

Athée = personne qui affirme l’inexistence de Dieu (qui est CONTRE la religion : anti-religieux)

Agnostique = personne qui n’affirme aucune conviction religieuse (doute ou indifférence) : sans religion ; areligieuse

 

III. La croyance religieuse est-elle nécessairement en conflit avec la raison ?

Présupposé : le conflit existe. Et pas seulement parce qu’il a, historiquement, eu lieu : ce conflit est nécessaire (essentiel antagonisme entre : la foi / la science et la philosophie)

 

Introduction : Jusqu’au XVIIIème siècle, en Occident, la religion était incontestée. On ne se demandait pas si l’on était croyant ou pas : on était croyant par définition, comme on est italien, suisse ou malien : par naissance. La croyance religieuse faisait partie de l’identité profonde de l’individu. Ceci n’empêchait pas qu’on se définisse comme « animal raisonnable ». L’exercice de la Raison et la profession d’une croyance coexistaient sans problème apparent. C’est encore le cas de nos jours dans certains états où l’appartenance de l’individu à une religion va de soi et fait partie de son identité (elle figure, d’ailleurs, sur sa carte d’identité cf. Egypte, entre autres).

Cependant, en Occident, à partir du XVIIIème siècle, une distinction nouvelle apparaît : CROIRE et SAVOIR ne reviennent plus au même. Telle est la naissance du conflit : la religion veut exercer une tutelle sur les sciences et la philosophie/ la Raison veut s’affranchir du droit de regard de la Religion. Cette volonté d’autonomie de la Raison s’est traduite par un conflit ouvert, initié par les philosophes du XVIIIème siècle : hommes de Raison qui ont proclamé leur droit de se déclarer athées.

Quelles sont les raisons profondes de ce conflit ? Religion et Raison sont-elles inévitablement conduites à se contredire ou à s’ignorer ? Comment pouvons-nous, nous qui sommes des êtres raisonnables, penser le rapport qu’il y a entre la Foi et la Raison. Est-ce nécessairement en donnant raison à l’une et tort à l’autre ?

Nous remarquerons, au préalable, que cette question se pose de façon beaucoup plus aiguë pour le croyant : celui qui pense que la foi est synonyme de superstition ne s’encombre pas longtemps de la question : il a choisi son camp.

Le croyant, quant à lui, doit réussir à se penser à la fois comme croyant et comme être de raison (c’est-à-dire comme humain) : pour lui, une tension existe entre ces deux appartenances.

 

  1. Incompréhension entre la foi et la raison

Voyons tout d’abord en quoi la Raison et la Croyance s’excluent l’une l’autre. Tentons d’expliquer le pourquoi de leur dialogue impossible.

Il faut tout d’abord éviter de dévaluer la croyance en faisant un contresens sur le mot « croire »/ croire en Dieu et croire qu’il fera beau demain sont deux actes totalement différents et même antinomiques : dans un cas, on affirme avec force, on exprime son adhésion profonde / dans l’autre, on « pense mollement », on espère vaguement, on suppose…

Croyance religieuse = assentiment de l’esprit à une vérité sans justification rationnelle.

On voit bien que la Raison est d’emblée disqualifiée, hors-jeu.

Partant de là, toute tentative de la raison pour comprendre le phénomène de la croyance est vaine. Dieu, c’est l’impensable. Et la Foi se présente d’emblée pour ce qu’elle est : irrationnelle (elle repose sur des faits irrationnels par excellence : les miracles). Les miracles sont des faits que je ne connais pas dans leur nature de faits. Si j’en étais le témoin, il n’y aurait pas de croyance. Réfléchissons sur la figure du disciple Thomas, qui fut surnommé « Thomas l’Incrédule ». Alors que des bruits courent, en Judée, qui prétendent que ce Jésus crucifié quatre jours plus tôt est ressuscité, Thomas clame : « Quand j’aurais vu le Christ de mes yeux, quand j’aurais mis mes doigts dans ses plaies , je croirai qu’il est ressuscité ! ». Thomas se trompe : il devrait dire : je SAURAI qu’il est ressuscité. Jamais Thomas ne devient « croyant » (c’est pourquoi la tradition fait toujours état de lui comme incrédule) : le croyant, c’est celui qui adhère SANS VOIR, SANS SAVOIR. Il n’y a de croyance qu’en l’absence de preuves, qu’en l’absence de connaissances.

Et c’est bien parce qu’il est impossible à la Raison de comprendre la Croyance que toutes les interprétations de la Religion par la Raison sont réductrices. Selon la Raison-raisonnante, la croyance s’apparente toujours à la magie, à la superstition. (« Croire, c’est aussi fumeux que la ganja », a dit Gainsbourg  dans Negusa nagast).

 

a. Quand la Raison englobe la religion : trois exemples d’interprétations réductrices de la religion par la Raison (la philosophie)

SARTRE : La religion est la bouée de sauvetage d’un esprit pas assez mûr, ou d’une liberté pas assez courageuse pour affronter ses responsabilités. Ni pour regarder la mort en face. La religion est une fuite.

L’explication la plus commune de la religion par la Raison, c’est l’ignorance : la religion répond aux questions auxquelles la science n’arrive pas (pas encore) à répondre. « Dieu, cet asile de l’ignorance » (Spinoza) et la prière, « le désespoir de la Raison » (texte de Spinoza, Hatier 1 p 272)

« Une religion, qu’est-ce d’autre qu’une doctrine qui explique quelque chose que             l’on ne comprend pas (l’existence de l’univers, de la vie, de la pensée…) par             quelque chose que l’on comprend encore moins (Dieu) ? »

André Comte-Sponville (Présentation de la philosophie)

FREUD : L’Avenir d’une illusion (1932) : Hatier 13 p 195/ Russ 12 p 406

3 explications de la religion

– la détresse infantile

– l’exigence de Justice

– la curiosité (énigmes de la vie)

L’illusion religieuse apporte à l’homme une consolation. Elle répond à la « détresse infantile », laquelle se prolonge toute la vie : détresse de l’homme, qui se sent si petit, perdu dans l’univers infini (on sent cela chez Pascal), si impuissant face à la mort. Quel réconfort que de pouvoir se dire : « je suis l’enfant chéri d’un Père Tout-puissant. Grâce à Lui, je suis au centre de l’univers ».

La religion relève de l’infantilisme, de la névrose (maladie d’origine non physiologique qui se caractérise par des troubles affectifs et émotionnels et une conscience excessive des états morbides). Névrose suscitée par le désir de protection d’un Père (le désir archaïque d’un père tout-puissant, juste et protecteur)

Russ 14 p 438 : le besoin d’admirer de l’homme (vir ?) : de la proximité entre le Père et le besoin du Grand Homme. Le besoin de héros (on peut penser au cinéma américain).

La religion est un « poison doux-amer » administré dès l’enfance.

On peut tenter un parallélisme entre l’individu et l’humanité : de même qu’à l’adolescence, l’enfant cesse d’idéaliser son père et voit, souvent cruellement, ses limites, une humanité vraiment mature saura, bientôt ( ?), se passer de Dieu.

MARX : Hatier 12 p 194/ Russ 2 p 362: « La religion est le soupir de la créature accablée par le malheur, elle est le cœur d’un monde sans cœur comme elle est l’esprit d’une époque sans esprit : elle est l’opium du peuple » Contributions à la critique de la philosophie du Droit de Hegel (1843)

Cette phrase dit la vertu consolatrice de la religion, sa vertu compensatrice (moyen facile de remplir un vide, solution de facilité), sa vertu dormitive. La religion est ce qui est utilisé par les politiques pour endormir le peuple. Pour qu’il prenne moins conscience de sa misère, de son exploitation, pour qu’il ne se révolte pas. La fausse espérance d’un au-delà affaiblit la volonté d’améliorer la vie « ici et maintenant ».

« Sans être un militant d’aucune religion, je pense que l’on peut reconnaître la religion comme une source d’apaisement utile au fonctionnement de la République. »

(Nicolas Sarkozy / La République, les religions, l’espérance / p. 157)

Aujourd’hui, ce qui n’est plus vrai de la religion peut toujours valoir pour les matchs de foot, les séries télévisées ou la télévision en général. Petit rappel : c’est dans les pays les plus durement exploités de la planète (ex : le Brésil) que l’engouement pour le football est le plus spectaculaire.

Pour Marx, la Foi et la Raison sont opposées : c’est la classique opposition entre l’illusion et la Raison.

A la lumière de ces trois exemples, on voit que rationaliser la croyance revient à détruire la foi. Cependant, le point de vue qui était le nôtre jusqu’ici, c’était que la Raison voulait comprendre la croyance. Voyons maintenant comment la Religion essaie de se défendre de la Raison, de la tenir à distance.

 

b. Quand la Religion englobe la Raison

Parlons ici du rôle du DOGME : c’est l’énoncé d’une vérité indiscutable, figée, qu’on ne peut qu’admettre. Elle est présentée comme le fondement de la foi.

Le dogme met la Raison hors-jeu. On ne peut qu’adhérer au dogme ou le refuser, pas en discuter les termes : ni jugement personnel ni raisonnement.

Est ainsi révélée l’essence du religieux : une demande d’adhésion inconditionnelle, sans esprit critique. On connaît l’apologie de la « foi du charbonnier » : la Foi est un sentiment ; les croyants les plus ardents ne sont pas forcément les plus subtils (au contraire !)

Idem : l’idée de REVELATION.

On aboutit donc à une antinomie. C’est celle qu’avait annoncé Pascal : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas »

L’intelligence et les sentiments sont deux ordres radicalement différents, qui ne peuvent se comprendre l’un l’autre.

Saint Paul : « La sagesse des hommes est folie aux yeux de Dieu. La sagesse de Dieu est folie aux yeux des hommes » (cf. parabole des « ouvriers de la dernière heure »)

Une solution subsiste toutefois : à défaut de se comprendre, la Religion et la Raison ne peuvent-elles pas se tolérer ? D’autant plus qu’elles ont certains points communs.

3. Possibilités de conciliation entre croyance et raison

1ère tentative de conciliation : sur le terrain de la Raison : on va essayer de justifier rationnellement la croyance ; on va tâcher de prouver que Dieu existe.

Les théologiens, qui sont à la fois des hommes de religion et des hommes de Raison, vont, pendant des siècles (de saint Augustin à Kant) tâcher de produire des preuves de l’existence de Dieu.

Exemple : preuve ontologique = preuve par l’idée de Parfait : saint Anselme (reprise par Descartes et par Leibniz) : Dieu est l’Etre infiniment parfait, l’Etre tel qu’il n’en existe pas de plus grand OR, s’il n’existait que dans la pensée, on pourrait en concevoir un plus grand encore, qui existerait aussi dans la réalité DONC, Dieu existe nécessairement dans la réalité. Dieu possédant tous les attributs (Beauté, Bonté, Perfection…il possède nécessairement aussi l’Existence). L’essence de Dieu inclut son existence/ preuve « physico-théologique »…

Néanmoins, force est de reconnaître l’échec de ces preuves : d’une part, elles n’ont jamais convaincu personne (personne ne parvient à l’adhésion intime parce qu’il est convaincu par une démonstration). De plus, Kant a démontré leur vanité : vers la fin de la Critique de la Raison pure (« antinomie de la Raison pure »), il met face-à-face les preuves de l’existence de Dieu et les preuves de l’inexistence de Dieu. L’idée de prouver que Dieu existe est abandonnée à jamais.

2ième tentative de conciliation : tentative intéressée, sur le terrain de la politique : utilisation de la religion par le politique.

Ceux qui détiennent le pouvoir utilisent la religion comme un moyen de renforcer leur autorité.

Saint Paul, Epître aux Romains XIII ; I.7 (Itinéraires philosophiques STT p 173) : « Il n’y a point d’autorité qui ne vienne de Dieu »

Devoir d’obéissance au pouvoir temporel qui s’enracine dans la religion. L’aspect conservateur de la religion en fait un allié objectif pour l’ordre établi.

On pense aussi à la théorisation du « droit divin ».

Texte de Bossuet : le droit divin

On pense aussi aux multiples guerres où les belligérants proclament : « Dieu est avec nous ! ».

Selon Rousseau, la religion fournit le « supplément d’autorité » dont a besoin le pouvoir politique. (Si la menace « qu’on vous coupe la tête ! » ne suffit pas, le monarque peut ajouter « et vous irez griller dans les flammes de l’enfer pour l’éternité ! »)

Cependant, on n’est plus en train de parler ici d’une alliance entre la Foi et la Raison : on est en train de dénoncer la collusion entre deux institutions : la Religion et le Pouvoir politique. Ce que la religion demande au croyant, c’est d’être raisonnable c’est-à-dire de se plier aux autorités.

3ème tentative de conciliation : la morale

Il s’agit d’un authentique point commun entre la religion et la raison : on pense immédiatement à la prohibition du meurtre, fondement de la morale religieuse comme de la morale laïque. De même, la plupart des préceptes religieux (les prescriptions alimentaires notamment) coïncident avec les principes rationnels de l’hygiène : doit-on voir un simple effet du hasard entre la prohibition du porc dans la religion musulmane et le fait que ce soit la viande dont les bactéries sont les plus longues à neutraliser par la cuisson ? (c’est le raisonnement mené par Maïmonide, grand philosophe juif du Moyen-âge). De la même manière, l’imposition aux croyants de périodes de jeûne (le Ramadan pour les musulmans, le Carême pour les chrétiens) coïncide avec les préceptes de la diététique.

 

Allons jusqu’à l’idée qu’on pourrait réduire la religion au contenu de sa morale. On trouve trois applications à cela :

  • le Bouddhisme, religion sans Dieu ni âme (tous deux tenus pour des illusions dérivées du désir de protection et de conservation de soi), et même sans religiosité (textes 12 et 13 in Khodoss T2 p 140 //Walpola Rahula Hatier ES p 294 ; S p 285, 4 p 427. A ce titre, le bouddhisme est plus une sagesse, une philosophie basée sur l’annihilation du désir, qu’une religion.
  • Le « Dieu des philosophes » (la religion naturelle) : ce n’est pas un vrai Dieu car il n’a pas engendré le moindre culte : c’est ce qui reste de la religiosité après la critique philosophique de toutes les religions établies. Dans le déisme, Dieu n’est pas une personne mais un principe philosophique abstrait.
  • Le projet de Kant : celui d’une Religion dans les limites de la simple Raison : tout ce qui, dans la religion, dépasse la Raison, est écarté. Il reste la morale, dont Kant affirme qu’elle est l’essence de la religion. « La religion est la connaissance de nos devoirs comme commandements divins ». Mais qu’est-ce qu’une religion sans transcendance et sans culte ? Une religion sans mystère, sans rien qui dépasse la Raison, est-ce encore une religion ?

 

Si la Raison et la Croyance sont irréductibles l’une à l’autre, ainsi qu’on vient de le prouver, sont-elles pour autant en conflit ? Oui, si on les pense comme en concurrence, mais il existe une autre façon de les penser : les penser comme séparées et indépendantes.

 

  • La Raison et la Croyance doivent être absolument séparées l’une de l’autre

L’enjeu majeur de la Critique de la Raison Pure est de reconnaître Raison et Croyance comme absolument séparées l’une de l’autre. Le projet de Kant est de discerner les frontières de la Raison et celles de la Foi afin de définir à chacune son domaine propre.

Après Kant, la condamnation de Galilée (par le Tribunal de l’Inquisition, donc le Vatican, en 1633, pour la thèse de l’héliocentrisme) est devenue impossible : l’Eglise a enfin compris que si elle condamne des faits, elle se ridiculise. La démonstration scientifique se suffit à elle-même. La Raison n’a plus à se plier aux dogmes de l’Eglise. Il faut tout de même nuancer ceci : aujourd’hui encore, aux Etats-Unis, la théorie de Charles Darwin et Alfred R. Wallace (la théorie de l’Evolution des espèces) est contestée par les fondamentalistes chrétiens (les créationnistes).

De même, le fait religieux est d’un autre ordre que la Raison, qui ne peut ni l’affirmer ni l’infirmer.

D’après Kant, il y a trois questions fondamentales, qui résument toutes les questions philosophiques possibles (Russ 1 p 292) :

– Que puis-je connaître ?   (Raison théorique) : Critique de la Raison Pure

– Que dois-je faire ?             (Raison pratique) : Critique de la Raison Pratique

– Que m’est-il permis d’espérer ? (Croyance, Foi)

 

Dès lors, dire que la religion est réfutée par la science, c’est se tromper, tout confondre. C’est faire l’erreur qu’on faisait avant Kant, quand on pensait la Raison et la Foi comme en concurrence sur le même terrain.

Les explications biblique et scientifique du monde n’ont pas du tout la même vocation : l’explication mythique de la Bible ne prétend pas dire COMMENT cela s’est fait mais POURQUOI (quelle est la raison d’être de l’Homme ? du monde ?). La religion explore le domaine du SENS.

Certes, elles ont pour point commun la recherche de la vérité, mais il ne s’agit pas du tout du même type de vérité.

Vérités contingentes : « je me suis foulé la cheville », M.Bidule a quitté le gouvernement.

Vérités rationnelles : 2+2=4 (toutes les équations mathématiques) : vérités construites par l’esprit ; universalité ; adhésion nécessaire.

Vérité comme valeur : « Christ est vivant » « Arnaud Montebourt est le meilleur » : vérités d’adhésion, qui constituent un engagement subjectif que prend librement l’énonciateur. Est « vrai » ce qui donne sens à mon existence.

 

Hegel prétend tout autre chose : pour lui, la vérité est une mais elle se présente sous des formes complètement différentes: « La religion, ainsi que l’art mais sous une autre forme expose la vérité absolue : la philosophie pense et saisit conceptuellement ce que la religion représente »

Ainsi, la religion donne une image de la vérité / la Raison la pense, la conceptualise.

On préfèrera poser la stricte séparation des domaines.

Nietzsche in Humain, trop humain : « Il n’existe entre les religions et la science véritable ni parenté, ni amitié, ni même inimitié : elles vivent sur des planètes différentes »

N’oublions pas qu’il existe des philosophes (ou des scientifiques) croyants, c’est-à-dire des gens qui excellent dans l’exercice de la Raison et qui, en même temps, sont des croyants fervents, juifs, chrétiens ou musulmans. C’est bien qu’ils savent distinguer les deux ordres, entre lesquels ils n’aperçoivent pas de contradiction.

 

 

 

 

Auteur : scipionlafricain

je suis prof donc je bloggue

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